Le wokisme, en tant que courant idéologique, a clairement une influence sur la publicité moderne. Ce mouvement, qui met en avant des valeurs comme l’égalité, l’inclusivité et la justice sociale, s’intègre de plus en plus dans les messages des campagnes publicitaires. Pour certaines entreprises, cela répond à une attente de leur clientèle, notamment des générations plus jeunes, qui souhaitent voir les marques s’engager sur des sujets sociétaux importants.
Publicité et idéologie : un équilibre délicat
Cependant, cette tendance soulève des questions. D’une part, la publicité est souvent perçue comme un espace neutre, dédié uniquement à la promotion de produits ou de services. D’autre part, intégrer des valeurs idéologiques dans les campagnes peut être interprété comme une prise de position politique. Ce choix peut diviser les consommateurs, certains applaudissant cet engagement tandis que d’autres y voient une intrusion ou un opportunisme : Certaines campagnes jugées trop moralisatrices ou politisées peuvent provoquer un rejet. Les consommateurs peuvent même boycotter une marque si le message va à l’encontre de leurs propres valeurs. Cela s’est déjà vu avec des campagnes controversées de grandes entreprises comme Gillette ou Bud Light.
En adoptant des éléments du wokisme dans leurs campagnes, les entreprises s’engagent sur un terrain sinueux :
Les marques prennent des positions politiques visibles
Mettre en avant des causes comme l’égalité raciale, les droits LGBTQ+, ou encore le féminisme est perçu par certains comme une adhésion à une idéologie progressiste.
Des campagnes polarisantes
Par exemple, des publicités de grandes marques comme Gillette (sur la masculinité toxique) ou Bud Light (mettant en avant une personnalité transgenre) ont suscité des controverses importantes, divisant les consommateurs entre soutien et rejet.
L’accusation de récupération idéologique
Certaines critiques voient dans ces campagnes une tentative opportuniste de capter des parts de marché, sans véritable engagement. Cela peut alimenter un sentiment de cynisme et renforcer les clivages politiques.
- Cohérence entre discours et actions : L’engagement en faveur de la diversité doit se traduire par des actions concrètes au sein de l’entreprise : recrutement, promotion, politiques internes, etc.
- Partenariats avec des associations : Collaborer avec des associations engagées dans la lutte contre les discriminations permet de renforcer la crédibilité des marques.
- Écoute des communautés : Les marques doivent être à l’écoute des communautés qu’elles souhaitent représenter, afin de co-construire des messages authentiques et pertinents.
Pour ses partisans, le wokisme représente un progrès sociétal et une prise de conscience des injustices systémiques. Pour ses détracteurs, il s’agit d’une idéologie militante qui impose une vision du monde spécifique, parfois perçue comme dogmatique ou moralisatrice.
Ainsi, lorsque des valeurs associées au wokisme s’insinuent dans la publicité, elles peuvent être interprétées comme une prise de position politique, volontaire ou involontaire. Les critiques viennent souvent de deux fronts :
- Une opposition idéologique : Certains rejettent les valeurs du wokisme, le considérant comme une menace pour les traditions ou les libertés individuelles.
- Une critique du rôle des marques : L’idée que des entreprises privées utilisent leur influence pour promouvoir une idéologie est perçue par certains comme une forme de manipulation ou de lobbying.
Une stratégie qui peut se retourner contre les marques
L’insinuation de thématiques woke dans la publicité peut générer des risques pour les marques :
Le backlash
Le terme “backlash” désigne une réaction négative et souvent violente à un changement social ou politique perçu comme menaçant. Dans le contexte de la publicité, le backlash survient lorsque des campagnes visant à promouvoir la diversité et l’inclusion sont mal reçues par le public. Des campagnes jugées trop politisées ou moralistes peuvent susciter un rejet. Les consommateurs en désaccord avec les valeurs affichées peuvent boycotter la marque, comme cela a été le cas pour certaines campagnes de Nike ou de Disney.
Le risque de l’hypocrisie
Le woke-washing est un terme utilisé pour désigner la pratique consistant pour une entreprise à communiquer largement sur un éveil de conscience (écologique, d’inclusivité raciale, de justice sociale, etc.) sans pour autant mener d’actions concrètes pour soutenir ces causes.
En comprenant les risques et les avantages du woke-washing, les entreprises peuvent prendre des décisions éclairées concernant leur engagement social et politique. Un engagement authentique en faveur de la diversité, de l’équité et de l’inclusion peut conduire à des avantages à long terme, tandis que des tentatives superficielles peuvent nuire à la réputation d’une marque.
Une récente étude montre que 69 % des Français perçoivent les initiatives inclusives des marques comme opportunistes
Conclusion
L’influence du wokisme sur la publicité illustre la manière dont les marques s’adaptent aux évolutions culturelles et sociétales. Ce phénomène montre que la publicité n’est plus seulement un outil commercial, mais aussi un moyen de refléter, voire de modeler, les débats de société. Cependant, cette tendance soulève des questions sur les limites de l’engagement des entreprises et leur rôle dans les discussions idéologiques.
Si certaines campagnes réussissent à susciter un dialogue constructif, d’autres risquent de polariser les opinions ou de passer pour opportunistes. Pour les marques, l’enjeu n’est pas seulement de répondre aux attentes de leur clientèle, mais aussi de rester crédibles et cohérentes dans leur communication. Finalement, le succès d’une campagne publicitaire ne se mesure pas seulement à sa visibilité, mais à sa capacité à établir un lien authentique et durable avec son audience, sans aliéner une partie de celle-ci.